Le nom de Mohon
À propos du nom de Mohon… Il faut en finir définitivement avec l'explication du nom de la commune qui fut rendu au 19e siècle d'après le breton mochon ou moc'hon signifiant cochon ou porc et non "sanglier" comme on le dit aussi, car cette dernière appellation était ignorée de nos ancêtres qui qualifiaient le porc sauvage d'après le latin singularis, seul, individuel, qui ne vit pas en groupe, dont on a fait par altérations successives senglaris, senglarius, sanglarius puis sanglier… En toponymie, les références aux animaux sont exceptionnelles et résultent presque toutes d'incompréhensions diverses et surtout de ce qu'on nomme en linguistique l'attraction paronymique qui fait qu'un mot très connu se substitue à un autre moins usité. Ainsi, lorsqu'ils entraient dans la forêt de Lanouée, ceux qui nous ont précédés évoquaient une contrée animalière riche en gibier, autrement dit le païs ès bisses, accès qui s'est transformé aux Forges et à Campénéac en l'incompréhensible Pas-aux-Biches dont la seconde composante n'est autre que le latin bestia, bête, dont l'ancien français a fait bisse vers le 12ème siècle et biche ensuite ; de la citation de tous les animaux de la forêt, on n'évoque aujourd'hui qu'un lieu de passage de la femelle du cerf, ce qui est incongru… C'est aussi le cas avec Durboeuf toujours aux Forges, formés sur le celtique dur, eau, qui est utilisé par de nombreux toponymes comme La Durance, Le Mont-Dore et Le Douro portugais et qui a produit le patronyme Durand très répandu, à l'origine un individu établi au bord de l'eau comme l'étaient les Dupont : la seconde composante est que l'ancien français boe dont le français moderne a fait la boue, sans aucun rapport on en conviendra avec le bœuf. Les seules allusions au animaux acceptables sont les amers, autrement dit les points de repère de la côte visibles par les marins depuis le large et on citera l'exemple de Penmarc'h en Finistère dont les contours affectent la forme d'une tête de cheval parfaitement identifiable. O
Définition de moch et de mog dans les Mémoires sur la langue celtique de Jean-Baptiste Bullet paru en 1754. Source : Google books. ublions donc les interprétations hasardeuses de Mohon (qui n'est pas non plus un nom d'homme) et ouvrons un copieux ouvrage en deux tomes publié à Besançon en 1754 intitulé Mémoires sur la langue celtique : l'auteur en est Jean-Baptiste Bullet, Premier Professeur Royal et doyen de la Faculté de Théologie de la ville, membre de l'Académie des Sciences et Belles-Lettres. L'extrait donné dans cette page montre que si moch veut bien dire cochon, il existe un autre moch qui avait autrefois le sens d'habitation et qui a été parfaitement ignoré des auteurs du 19e siècle : pas un seul village ou pas une seule ville de France (et d'ailleurs) n'est nommé "cochon" ou "porc", car il ne s'agit pas d'un repère fixe et indiscutable, l'animal étant instable parce que mouvant ; en revanche, l'indication d'une maison est omniprésente dans la toponymie parce qu'inscrite durablement dans le paysage comme c'est le cas, par exemple, avec La Chèze en Côtes-d'Armor, du latin casa qui a aussi donné son nom à La Chaise-Dieu en Haute-Loire, littéralement la maison de Dieu, autrement dit un monastère.
- - Ce serait une racine indo-européenne °mag– ou °mak– et variantes comme °mok– dont le sens était celui de pétrir qui aurait donné moch qui dans la langue celtique avait le sens d'habitation construite en dur par rapport aux loges qui étaient des abris de branchage recouverts de feuillage (Cf à Bréhan en Morbihan le lieu-dit La Loge-de-Beauval). Cette idée de pétrissage et de malaxage a donné °makjo dans la langue des Francs – le francique – avec le sens de faire, créer, fabriquer, dont l'anglais a retenu make et l'allemand machen de même sens, tandis que le français l'utilisait pour donner son nom au maçon via le latin machio, parce que l'artisan mélangeait intimement du sable avec un liant constitué de chaux ou de ciment et, plus anciennement, de terre battue dont il fallait une quantité importante pour construire, d'où aussi le
mot masse, volume conséquent, qui était à l'origine un amas de pâte pour faire du pain, sans aucun rapport avec la masse à frapper que le maçon peut aussi utiliser ; l'idée de faire macérer, c'est-à-dire tremper, est de même origine. La finale gutturale de moch l'a aussi fait écrire mog, forme que le vieux breton a retenue à propos d'une maison maçonnée et, par extension, à la famille qui l'occupait nommée mog ou moug et variantes, et aussi à la fumée qui s'échappait de la cheminée, moged et variantes qu'on retrouverait dans l'anglais smoke. Le mot mogach et variantes s'est également appliqué à l'assiette d'imposition qu'on nomme aujourd'hui foyer fiscal, parce qu'il s'agissait imposer chaque feu et non les individus eux-mêmes, d'où anciennement l'impôt nommé fouage et les réformations des fouages lorsqu'il fallait soumettre à l'impôt les nouvelles constructions et exclure celles qui avaient brûlé sans reconstruction. Dans le même esprit, ce que l'on appelait mogach ou mougach était la levée des hommes à fins d'incorporation dans les milices ou troupes seigneuriales ou ducales (Les paroissiens de Mohon furent entre autres appelés à construire les remparts de Rennes). L Dom Morice, Histoire de Bretagne, Preuves I, 793. Source : Google books. 'étymon indo-européen précité a aussi fourni au latin moenia, muraille, rempart, fortification, enceinte, qui a donné l'ancien français et le français munir, fortifier, défendre une place forte, et prémunir qui consistait à protéger "en avant" en installant une défense intermédiaire (ou poste avancé) à titre de précaution. Le breton l'a traduit par mogeria, murer, entourer de mur, d'où le patronyme breton Maguéro donné à un premier porteur qui pouvait être le constructeur de ces retranchements, l'occupant ou le voisin immédiat ; sous cette forme, ce nom fédère encore 16 naissances en France entre 1891 et 1915, dont 5 dans le Morbihan, à La Chapelle-Caro, Marzan, Nivillac et Péaule, tandis que le toponyme existe sous cette forme au sud-est de Guégon, ancien Maguero de la carte de Cassini.
De préférence à la construction de maisons en dur qu'il est difficile d'envisager vers le 11ème siècle pour le commun des mortels, ce serait la présence des retranchements de Trohanier, plus connus sous le nom du Camp des Rouëts1, qui aurait donné son nom à Mohon, à comprendre comme étant à l'origine la paroisse où se trouvait cette fortification, un ancien Mochou ou Moghou qui, par amuïssement2 du c, serait devenu Mohou ou Mohon, de la même manière que le nom de la commune de Rohan vient d'un ancien roc'han, petit rocher et que la première composante de celle de Bréhan se note toujours Brec'h à 6 kilomètres au nord d'Auray en Morbihan. Les exemples sont nombreux et on se limitera à citer le breton floc'h, page porteur de l'écu d'un chevalier, écuyer, qui a donné les patronymes Floho ou Flohic, ce dernier étant un diminutif affectif ; idem pour le précité marc'h, cheval, dont est issu marc'hek, cavalier, qui a donné leur nom aux [Le] Marec. La finale en n du nom actuel (qui exprime le pluriel breton précisant qu'il existait une succession de remparts) pourrait être issue d'un mauvais déchiffrage paléographique, car les u et les n dis "ouverts" se confondent comme on peut encore le voir dans les anciens registres paroissiaux (Cf. illustration). Pour s'en convaincre, on se réfèrera au Castel-Mohon situé au sud-ouest de Persquen en Morbihan qu'on comprendra comme étant un château construit en dur, et non une motte féodale obtenue par décaissement et élévation subséquente, défendue par des pieux. D'ailleurs, ce toponyme Trohanier3 utilisait lui aussi cette référence à des murailles construites de main d'homme, de tro, tour, lieu où l'on pouvait tourner autour, entouré, circulaire (comme dans le Tro-Breizh qui était au Moyen-Âge un pèlerinage qui consistait à faire un "tour de Bretagne" afin de se rendre sur le tombeau des évêques fondateurs de la province), et de han, autre forme de hen, vieux, ancien. La suffixation en –ier n'est pas bretonne et prend le sens d'endroit, de lieu, ce que confirme un Mohonnais en signalant que Trohanier désignait le champ à côté du manoir et non la motte castrale elle-même, cela n'étonne pas, car les notaires qui rédigeaient les titres de propriété des biens fonciers avaient pour habitude de nommer le bien d'après l'élément remarquable et incontestable le plus proche du lieu : on trouve ainsi certaines pièces de terre qui font référence à un moulin à eau ou à vent parfois éloigné. Le même informateur évoque la présence au lieu d'un ancien cimetière : on sait que de juin 1638 à février 1639, la "contagion" était dans la paroisse de Mohon,
ce qui occasionna une vingtaine de décès qui fit qu'on inhuma dans les cimetières de Haut et de Bas ; d'autres épidémies se sont succédé et ont fait qu'il n'était plus possible d'enterrer dans les terrains consacrés : de nombreux villages procédaient aux mises en terre dans des parcelles qui furent ultérieurement redécouvertes après être tombées dans l'oubli. La même idée de fortification se retrouve dans Bodieu4 dans lequel la première composante est identique à celle de Bodiné en Les Forges, de bod, demeure, résidence, qu'on retrouve dans Bodégat5 qui est peut-être à comprendre comme étant bod ès garz, une maison protégée par une haie d'épineux (un hallier) qu'on retrouve dans les communes voisines sous le nom de Plessis, de plesse, haie tressée. La seconde composante du toponyme des Forges est le din de Crédin, de cré identique au bré de Bréhan, hauteur, et din qui introduit une notion de défense, de fortification comme dans Verdun et Issoudun et qu'on retrouve dans le mot dune, butte, ancien °duno gaulois, d'où Lugdunum, l'ancien nom de la ville de Lyon. On dit parfois que les noms propres n'ont pas d'orthographe, et on trouve bien d'autres notations du nom de Mohon, comme dans cette transcription d'un acte de 1201 donné par le bénédictin Dom Morice dans son Histoire de Bretagne (Preuves I, 793) dans laquelle on lit Alanus (Alain) de Mehon et aussi Willelmus de Badioc, peut-être un Guillaume de Bodieu. Pour en terminer, il sera rapporté que la référence à l'animal est toujours présente dans la commune, car le mocher ou moc'her était le porcher, le gardien de porc tandis qu'on disait plutôt mochaer ou moc'haer à propos du marchand : le nom de métier est devenu patronyme avec les Mocaer qui sont devenus par métathèse (inversion de syllabes comme dans le Gallo beurva, abreuvoir, ou BréhanBeurhan) les Maucarré d'aujourd'hui, un nom rare puisqu'il n'enregistre que 24 naissances en France entre 1891 et 1915 dont la quasi-totalité en Morbihan (dans le secteur de Ménéac) et en Seine-etMarne où des familles Bretonnes se sont installées. Les porteurs sont invités à faire respecter l'exacte notation de leur patronyme, car le phénomène d'attraction paronymique déjà évoqué a transformé ce nom en Moncarré, par exemple à Bignan en Morbihan ou à Merdrignac en Côtesd'Armor, mais la nature n'a jamais façonné de mont-carré, ni en France ni ailleurs !
En bas à gauche de l'image, dans les actes de juillet 1672, la finale du nom de Mohon n'est pas si évidence à lire… Source : © Archives départ. du Morbihan.
1 Camp des Rouëts en Mohon : si la première composante n'appelle pas de commentaire particulier (le latin campus a donné des mots comme camp, champ et décamper qui voulait dire "lever le camp") ; la seconde pourrait aussi contenir la notion de circularité du lieu évoquée par le breton tro. Au 12ème siècle, le mot roe, du latin rota, était employé à propos de l'idée de rotation, d'où la roue et le rouet qui servait à filer, également dans le sens giratoire autour duquel on tourne en voiture ou en roulotte… À rapprocher peut-être du Rouéfort en Coëtlogon autrefois en Plumieux, fut au 16ème siècle la propriété de Geoffroy du Tertre (ou de La Tertre) dont on constatera que le patronyme rappelle opportunément la motte castrale… (Source : Réformation de la noblesse du 27 mai 1536 dans l'Évêché de Saint-Brieuc). En ancien français, roie ou roye et variantes avait aussi le sens de limite territoriale, parce que les frontières étaient autrefois tracées à la charrue et le breton disait roues ou rouez à propos d'une clairière créée de main d'homme dans une forêt.
2 Amuïssement : du latin mutus, muet.
3 Trohanier en Mohon : à rapprocher de Trohanet en Langolen (Finistère) où existe un château très ancien.
4 Bodieu en Mohon : à rapprocher de Bodiel en Taupont et Bodien en Limerzel (Morbihan) siège d'anciens prieurés.
5 Bodégat en Mohon : à rapprocher de Bodégan en Guégon (Morbihan) où existent des retran
Mohon Les formes Moton, de 872 ; et Muthon, de 1066, montrent que ce nom n'a rien à voir avec le mot breton mo'ch, 'les porcs'. Il s'agit vraisemblablement d'un nom d'homme en vieux breton.
Histoire Au temps où la forêt de Brocéliande couvrait l'ensemble de l'Armorique, le territoire de Mohon était déjà fort apprécié pour son or, son minerai de fer, ses grands chênes et son gibier. Carrefour des principales voies qui traversent la Bretagne, le pays est le siège des réserves des troupes romaines. Au cours du temps, les camps se succèdent, celui de Bodieu établi par Corsold, le roi des Frisons, plus tard le Camp des Rouets qu'occupent les rois de Bretagne puis Éon de l'Estoile, le célèbre hérétique. Lorsqu'en 1668 les troupes anglaises rasent le château de Josselin, Bodieu sert de refuge aux gentilshommes et résistants de l'époque. Les moines de Saint-Jacut y établissent un prieuré en 1221. Un second prieuré est fondé près du château de Bodegat qui sera en partie détruit à la Révolution. À cette époque, la forêt de Lanouée fourmille de chouans, avec à leur tête Pierrot dit Saint-Régent, lieutenant de Cadoudal. Le nom de ce dernier est lié à l'attentat manqué du 24 décembre 1800, jour où le Premier consul Bonaparte, parti pour l'Opéra, à Paris, échappe de peu à la mort. Saint-Régent et l'un de ses complices sont arrêtés peu après l'attentat. Ils seront décapités sur la place de Grève.
Que signifie le blason de Mohon ? blason de Mohon Les troix croix : Système de symboles signes de Mohon, La Trinité Porhoët et Ménéac Les trois traits serpentés Les trois cours d'eau de Mohon : le NINIAM, le LEVERIN et le FRELAN Les trois étoiles et la feuille de trèfleEmblème d'une maison de Bodieu et de la maison du Sénéchal Une décoration du feuillage de la forêt Commune de Mohon appelée autrefois pays des cochons, dont la nourriture était les glands des chènes de la forêt Pour en savoir plus : Livre de Marthe-Paul REMINAC Grandeur et Prestige du Porhoët 1991 http://www.infobretagne.com/mohon.htm